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CRITIQUES DE CONCERTS 02 avril 2025

Nouvelle production de La Khovantchina de Moussorgski dans une mise en scène de Calixto Bieito et sous la direction d’Alejo Pérez au Grand Théâtre de Genève.

Tous pourris !
© Carole Parodi

Absente depuis quarante ans de la cité helvétique, La Khovantchina fait son retour à Genève à travers un implacable parallèle entre la Russie du XVIIe siècle et le Kremlin contemporain, mais avec un tel nihilisme qu’on finit par perdre toute compassion pour les personnages. Une distribution splendide et un orchestre enchanteur consolent un peu de tant de noirceur.
 

Grand Théâtre, Genève
Le 30/03/2025
Yannick MILLON
 



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  • Il y a douze ans Ă  Munich, Calixto Bieito transposait dĂ©jĂ  Boris Godounov Ă  l’époque contemporaine, le peuple brandissant des photos des grands dirigeants de l’époque. Pour le retour de La Khovantchina Ă  Genève, le Castillan renouvelle son propos sans citer cette fois aucun politique alors mĂŞme que l’invasion russe en Ukraine de 2022 a exacerbĂ© les tensions.

    On aura pourtant parfaitement reconnu parmi la galerie de portraits peu reluisants brossĂ©s par le metteur en scène le chef des mercenaires du groupe Wagner, Evgueni Prigojine. Aussi actualisĂ©e qu’universelle, l’approche n’est pour autant pas toujours limpide (le slogan « on ne fait pas d’omelette sans casser des Ĺ“ufs ! Â») en dĂ©pit de quelques images fortes, comme le wagon de la dĂ©portation finale des Vieux-Croyants.

    On souffre surtout d’une caractérisation extrêmement négative des personnages, non seulement pétris de contradictions, tiraillés dans des alliances volatiles au moment de la montée sur le trône de Pierre Le Grand, mais ici constamment odieux, ruinant tout effort d’identification à leur destins tragiques.

    Il est jusqu’à l’inoffensif Kouzka de devenir un nĂ©crophage dĂ©vorant la dĂ©pouille de Staline en caressant son ventre replet avec un air vicieux, Ă  l’esprit Ă©clairĂ© du prince Galitsine de planquer de la vodka dans sa maquette du parlement europĂ©en, et Ă  l’amoureuse Marfa de cĂ©der Ă  ses pulsions meurtrières. Un univers nihiliste (« La mort rĂ©sout tous les problèmes. S’il n’y a pas d’hommes, il n’y a pas de problèmes. Â» projetĂ© sur le rideau de scène) dont la compassion peine Ă  sortir indemne.

    Heureusement, la musique laisse percer quelques bouffées d’espoir. L’Orchestre de la Suisse romande fait rayonner ses bois, notamment des flûtes lumineuses, sous la direction subtile et fluide d’Alejo Pérez, qui peine seulement à trouver le tempo juste à l’acte V – conclu par la mystique orchestration de Stravinski. On demeure toutefois gêné, en cette représentation de matinée, par ces chœurs (excellents bien qu’hétérogènes sur les aigus des sopranos) et solistes toujours en retard sur l’orchestre.

    En revanche, le plateau compte parmi les plus impeccables qu’on ait entendus. Les ténors en particulier sont éblouissants, du Prince Andreï juste assez héroïque d’Arnold Rutkowski au Galitsine parfait de morgue de Dmitri Golovnine, en passant par le Kouzka très peuple d’Emanuel Tomljenović et le Scribe glapissant de Michael J. Scott. Vladislav Sulimsky expose un somptueux matériau en Chaklovity presque trop sur la réserve dans son bouleversant air central de l’acte III.

    Au sommet de la distribution, le Khovanski brut de décoffrage de Dmitri Ulyanov, projection décoiffante, monument d’arrogance et de lubricité, et le Dossifeï en négatif de Taras Shtonda, d’une rondeur, d’une onction de basse chantante un peu plafonnante d’intonation, parfait en monomaniaque religieux traînant sa grosse carcasse enveloppée dans un tapis en guise de manteau, une icône autour du cou.

    Saluons enfin la Marfa de l’Américaine Raehann Bryce-Davis, en rien colossale mais d’une beauté du timbre, d’une ferveur du vibrato et de la voix de poitrine, d’un soin de la ligne qui feraient merveille, n’était l’absence presque totale des consonnes russes, durement ressentie au cœur d’une distribution particulièrement idiomatique.




    Grand Théâtre, Genève
    Le 30/03/2025
    Yannick MILLON

    Nouvelle production de La Khovantchina de Moussorgski dans une mise en scène de Calixto Bieito et sous la direction d’Alejo Pérez au Grand Théâtre de Genève.
    Modest Moussorgski (1839-1881)
    La Khovantchina, drame musical populaire en cinq actes (1881)
    Livret du compositeur
    Orchestration de Chostakovitch, scène finale de Stravinski

    Maîtrise du Conservatoire populaire de Genève
    Chœur du Grand Théâtre de Genève
    Orchestre de la Suisse Romande
    direction : Alejo PĂ©rez
    mise en scène : Calixto Bieito
    décors : Rebecca Ringst
    costumes : Ingo KrĂĽgler
    Ă©clairages : Michael Bauer
    vidéo : Sarah Derendinger
    préparation des chœurs : Mark Biggins

    Avec :
    Dmitri Ulyanov (Ivan Khovanski), Arnold Rutkowski (Andreï Khovanski), Dmitri Golovnin (Prince Galitsine), Taras Shtonda (Dossifeï), Raehan Bryce-Davis (Marfa), Vladislav Sulimsky (Chaklovity), Ekaterina Bakanova (Emma), Michael J. Scott (Scribe), Liene Kinča (Susanna), Emanuel Tomljenović (Kouzka), Vladimir Kazakov (Premier strelets), Mark Kurmanbayev (Deuxième strelets), Rémi Garin (Streshnev), Igor Gnidii (Varsonofiev).

     


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