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DOSSIERS |
21 novembre 2024 |
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Une Tosca de grand luxe
Giacomo Puccini (1858-1924)
Tosca
Angela Gheorghiu (Tosca)
Jonas Kaufmann (Mario)
Bryn Terfel (Scarpia)
Chœur et Orchestre de l’Opéra royal de Covent Garden
direction : Antonio Pappano
mise en scène : Jonathan Kent
DVD EMI 4 04063 9
Même si Angela Gheorghiu n’est pas sur scène la Tosca la plus percutante que l’on connaisse, ni la plus dramatiquement investie, elle reste l’une des vraiment très belles voix de l’époque.
Et comme le physique compense très largement ce que la voix pourrait manquer en force pour certains, on approche ici d’une sorte d’idéal théâtral et vocal avec les partenaires qui l’entourent, dans un spectacle qui se contente de raconter l’histoire et de mettre le chant en valeur sans nous exposer d’abord les tourments de l’inconscient du metteur en scène comme c’est le cas dans la plupart des productions indigestes que l’on nous assène partout depuis quelque temps.
Terfel est un Scarpia phénoménal et Kaufmann pare le rôle de Mario de ces mille nuances qui en font une interprétation magistrale à tous égards. Excellente direction de Pappano. Bref, tout ce qu’il faut quand on aime le beau chant et Puccini plus que le docteur Freud.
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Retrouver Zizi
Zizi je t’aime
Les plus grands succès de Zizi Jeanmaire du Casino de Paris au Grand Échiquier
DVD BelAir Classiques BAC047
Elle fut grande danseuse classique, muse de Roland Petit, créatrice des chansons de Gainsbourg ou Guy Béart, actrice de théâtre à Paris et de cinéma à Hollywood, meneuse de revue au Casino de Paris dans les incroyables costumes du jeune Saint-Laurent, Zizi Jeanmaire a fait une carrière absolument unique dans l’histoire du spectacle à notre époque.
BelAir classiques a rassemblé ici des extraits, dont certains inédits, des grands moments de Zizi au Music Hall. On part de 1960 pour arriver en 1978, une suite de jalons de ce parcours incroyable qui nous fit rêver dans tant de salles intimes ou gigantesques. Les plus belles jambes du monde, certes, des yeux à vous faire tomber par terre, mais surtout l’intelligence d’une gouaille sans vulgarité et d’une élégance naturelle qui ont fait d’elle l’icône de la parisienne dans le monde entier.
Un bien bel hommage sans nostalgie et des images que la nouvelle génération va pouvoir connaître, elle qui n’a pas eu notre chance de voir tout cela en live.
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Pour l’amour de Kathleen
Kathleen Ferrier
The complete EMI recordings
3 CD EMI Classics 9 56284 2
Complétant ce qui a pu être publié par d’autres firmes, EMI a rassemblé en 3 CD tous les enregistrements que Kathleen Ferrier réalisa chez eux. On y retrouve tous les compositeurs que cette voix unique et ce sens inné de la musicalité servirent pendant trop peu de temps, les baroques, les Britanniques, les romantiques, Mahler, avec des prises jamais publiées des Kindertotenlieder, l’intégrale d’Orphée de Gluck, de larges extraits de la Messe en si mineur de Bach. Instructif, émouvant, irremplaçable.
Personne n’a depuis abordé toutes ces pages avec un timbre aussi naturellement chargé d’émotion et un grain d’une qualité aussi rare. Référence absolue.
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Le bœuf de Tharaud
Le bœuf sur le toit – Swinging Paris
Alexandre Tharaud, piano
CD Virgin Classics 440 737
Jamais à court d’idées, Alexandre Tharaud a voulu célébrer la musique qui bouillonna sous mille formes au Bœuf sur le toit de la rue Boissy d’Anglas dans les années 1920. Ce cabaret-restaurant-music-hall où l’on venait en grande tenue s’encanailler entre gens chic fit découvrir le jazz et aussi Gershwin grâce de grands interprètes comme le duo Wiener-Doucet, à des compositeurs comme Milhaud.
Entouré aussi bien de Frank Braley pour Gershwin que de Natalie Dessay qui chante le blues, de Juliette ou encore de Benabar, de Guillaume Gallienne, de Madeleine Peyroux, Tharaud redonne vie à tout cet univers créatif, festif, assez déjanté voire iconoclaste avec esprit, qui n’a plus d’équivalent aujourd’hui et où naquit l’expression « faire un bœuf », puisqu’on se mettait à improviser à plusieurs quand l’envie en prenait.
Le contraire de la morosité en musique, avec une verve épatante.
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La passion Rachmaninov
Sergei Rachmaninov (1873-1943)
Préludes pour piano
Guillaume Vincent, piano
CD NaĂŻve V 5296
Ce n’est pas en pensant qu’un tel disque est vendeur mais seulement parce qu’il adore cette musique que le jeune Guillaume Vincent a consacré ces deux CD à l’intégrale des Préludes de Rachmaninov.
Très brillant musicien révélé notamment par le Concours Long Thibaud et doté à vingt-et-un ans d’une déjà longue expérience du concert, Vincent aborde ces préludes en toute liberté et sans chercher à imiter personne ni à se situer dans telle ou telle tradition. Juste comme il le ressent et comme il l’aime. Et c’est d’une magnifique qualité pianistique, avec une sensibilité vibrante, à la fois puissante et fragile, qui s’exprime par la subtilité d’un toucher lumineux.
Les options de tempi ou d’accents peuvent parfois surprendre car elles sont nouvelles, personnelles et rompent avec ce que les grands russes nous ont toujours habitués à entendre. Une autre manière de nous raconter ces pages dans une autre lumière, par un pianiste surdoué qui ne fait que commencer à nous étonner.
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Alto mes amours
Johann Sebastian Bach (1685-1750)
Suites pour violoncelle n° 1, 3 et 5
Transcriptions pour alto
Antoine Tamestit, alto
CD NaĂŻve V 5300
En entendant les sons qu’Antoine Tamestit produit avec son alto dans ces trois suites de Bach, on comprend pourquoi, ayant débuté par le violon et le violoncelle, il fut finalement séduit par cet instrument réunissant les qualités des deux autres et installé dans une tessiture chaleureuse, naturelle, réconfortante.
Tamestit est aujourd’hui l’un des plus grands altistes au monde. Il joue ici des transcriptions des Suites pour violoncelle n° 1, 3 et 5 de Bach sur son merveilleux Stradivarius de 1672, premier alto fabriqué par le célèbre luthier. Sonorité incroyable de moelleux et de mordant, phrasé d’une rigueur et d’une vérité totales, constructions absolument convaincantes avec une musicalité expressive permanente, c’est une plaisir immense que d’écouter cet enregistrement, tant pour la leçon d’exécution instrumentale qu’il donne que pour l’approche de Bach qu’il propose. On est en plein Nirvana…
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Pour Don José
Georges Bizet (1838-1875)
Carmen
Magalena Kožená (Carmen)
Jonas Kaufmann (Don José)
Genia Kühmeier (Micaëla)
Kostas Smoriginas (Escamillo)
Orchestre philharmonique de Berlin
direction : Sir Simon Rattle
2 CD EMI 4 40285 2
Un Don José de Kaufmann (toujours lui…) c’est forcément un événement, d’autant que c’est le premier au disque seul et que c’est le reflet de la production salzbourgeoise du printemps dernier au festival de Pâques. Reconnaissons pourtant qu’il est inégalement entouré.
La Carmen de Magalena Kožená déçoit. Voix trop claire, pas de sensualité du tout, diction de dadame plus que de gitane. Même chose pour l’Escamillo à la voix atone et désagréable de Kostas Smoriginas. En revanche, rien que des superlatifs pour la Micaëla de Genia Kühmeier que l’on vient aussi d’entendre à l’Opéra Bastille. La voix est belle, franche, l’émission assurée, la diction parfaite. Magnifique !
Restent le Philharmonique de Berlin et Sir Simon Rattle. On pourra trouver les accentuations sautillantes de ce dernier parfois excessives, mais la sonorité d’ensemble est somptueuse, parée de mille couleurs et la passion, qui manque tant à l’héroïne principale, déborde en permanence. De quoi se laisser tenter, malgré les erreurs de casting !
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Un Bach romantique
Johann Sebastian Bach (1685-1750)
Partita n° 2 en ut mineur BWV 826
Toccata en ut mineur BWV 911
Partita n° 6 en mi mineur BWV 830
David Fray, piano
Grand bonheur de retrouver David Fray au meilleur de lui-même, c’est-à -dire engagé passionnément dans l’univers de Bach. Ce n’est plus tout à fait la même approche qu’à ses débuts, mais il y a ici une vision d’une force expressive qui touche et même impressionne.
Le toucher est superbe de fermeté et de contrôle, les constructions échafaudées avec intelligence, l’investissement total. C’est certes un Bach d’une générosité toute romantique, mais sans excès, et l’on aime cette ardeur interne qui donne une vie irrésistible à ces deux Partitas et à la Toccata en ut mineur.
Du beau piano et du Bach tonique, imaginatif, mais respectueux.
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Voyage en Espagne
Enrique Granados (1867-1916)
Allegro de concert
Danses espagnoles
Guillaume Coppola, piano
CD Eloquentia EL 1236
Il avait impressionné avec un premier CD Liszt. Guillaume Coppola, qui compte parmi les surdoués de la toute dernière génération, nous revient avec un choix de pièces de Granados. Un autre romantisme où le rythme et la couleur dominent sur la haute virtuosité, encore qu’il ne s’agisse pas de pièces faciles du tout, ne serait-ce par exemple que l’Allegro de concert qui ouvre ce programme.
Les Danses espagnoles qui suivent sont variées, dans des humeurs bien diverses et le jeu du jeune pianiste est d’une imagination et d’un éclat remarquables. Il y a un rapport puissant avec l’instrument et une sensibilité très en phase avec ces pages bien trop absentes des récitals du grand circuit international. Une vraie fête pianistique et sonore.
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