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REVUE DE PRESSE |
14 novembre 2024 |
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International: À lire sur la Toile le 20 décembre
El Niño comme un ouragan
(Critique, Eric Dahan, Libération)
La création mondiale de El Niño (La Nativité) de John Adams au théâtre du Châtelet à Paris est incontestablement l'événement de cette fin d'année. Oratorio ou opéra ? La question ne semblait pas avoir été tranchée au lendemain de la première, vendredi 15 décembre, même si le minimaliste américain, associé à son vieux complice, le metteur en scène Peter Sellars, se défend d'avoir écrit un opéra.
La grande idée de John Adams ? Celle de mélanger les sources, y compris apocryphes et gnostiques, et de présenter la Nativité versant féminin. "El Niño devient une célébration mystique de la nature dans sa perception maya et aztèque, et un chant d'amour aux filles mères californiennes qui, parce qu'elles accueillent l'impossible, donnent comme Marie naissance à un paria, ouvrent de fait la possibilité de la tolérance et de l'amour", écrit le journaliste de Libération: une oeuvre à laquelle il tresse des lauriers d'un bout à l'autre de son article.
La musique compte pour beaucoup dans ce chant de louanges. "Difficile de parler encore de minimalisme en entendant cet art de la polyphonie empruntant au Moyen Age autant qu'à Ligeti, cette science du contrepoint, ces mouvements de crescendos et de decrescendos dynamiques, ces ostinatos qui semblent ralentis par des trilles calés sur une pulsation régulière."Même observation du quotidien britannique The Financial Times, sous la plume du journaliste Andrew Clark, même si, outre-Manche, on estime que la musique de John Adams tend trop à caresser le public dans le sens du poil.Les avis se rejoignent, par contre, pour reconnaître à la distribution vocale de rares qualités, à l'exception de la prestation de la basse Willard White, qui n'est pas du goût du Financial Times, mais qui enthousiasme Libération. Autre légère divergence, Dawn Upshaw, que le journaliste britannique encense, tandis que le Français lui attribue une gamme de couleurs et d'intentions moins étendues que celle de la mezzo Lorraine Hunt. Reste le dispositif vidéo, avec un film de Peter Sellars projeté sur scène et qui, selon Libération, permet à Sellars de "mettre en série, en toute logique postmoderne, de grands moments de l'imaginaire seventies : le couple qui se roule dans les sables de Zabriskie Point, les flics regardant le ciel, éblouis comme dans Rencontres du troisième type (
)"
Sellars a beaucoup d'imagination, le critique de Libération aussi. Pour se rincer le jugement critique avec une bonne douche froide, on peut lire aussi la critique de Michel Parouty pour altamusica.
Nikolaus Harnoncourt par Jordi Savall
(Interview, Jordi Savall, Classica)
Pour la deuxième année consécutive, le mensuel français Classica profite de la trêve des confiseurs pour inviter un artiste de renommée internationale à occuper le fauteuil de rédacteur en chef, le temps d'un numéro. Après Roberto Alagna l'an passé, c'est Jordi Savall cet hiver qui a décidé l'ordonnancement de "son" numéro et choisi les personnalités qu'il souhaitait interroger.
Cela donne quelques rencontres au sommet, parfois étonnantes, comme celle de Nikolaus Harnoncourt, dont l'interview – menée par Savall – est disponible dans son intégralité sur le site du distributeur français Abeille Musique. Une conversation passionnante s'établit entre le gambiste et le chef, filigranée par d'évidentes aspirations philosophiques. La musique comme transmission sensible de la vie spirituelle : cette phrase de Beethoven, citée par Savall, Harnoncourt la trouve merveilleuse.
Et le fondateur du Concentus Musicus de Vienne de rebondir sur le thème de la musique comme langage universel : "Pour un oiseau comme pour un homme, si vous voulez conquérir une femme, il y a un chant nuptial. Si vous vous contentez simplement de chanter, pour transmettre à quelqu'un d'autre quelque chose d'indicible, alors il est nécessaire, ne serait-ce que pour en venir à cette idée, de posséder quelque chose que la biologie seule est incapable d'expliquer."
L'art comme nécessité morale, aussi. "La manière dont un homme comme le commandant d'Auschwitz peut s'asseoir tranquillement et jouer Bach, c'est pour moi quelque chose de monstrueux, une forme de maladie
Je suis même fermement convaincu que l'art est ce qui fait de nous des êtres humains."
Quant à Harnoncourt comme précurseur du mouvement baroque au tournant des années cinquante, de l'eau a coulé sous les ponts depuis : "Il est très regrettable que des orchestres (N.D.L.R. : les grandes formations symphoniques) vraiment bons n'osent plus jouer Mozart, simplement parce qu'ils ne peuvent pas jouer sur instruments anciens (
) " Chiche pour le concert du nouvel an avec le Philharmonique de Vienne que dirige Harnoncourt ? Une marche turque ? |
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Le 20/12/2000 Sélection de la presse réalisée par Stéphane HAIK
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