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SELECTION CD |
10 avril 2025 |
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Tristan et Isolde (Sawallisch) |
Tristan et Isolde

Wolfgang Windgassen (Tristan)
Birgit Nilsson (Isolde)
Grace Hoffman (Brangäne)
Hans Hotter (Kurwenal)
Arnold van Mill (König Marke)
Fritz Uhl (Melot)
Walter Geisler (Ein junger Seeman)
Hermann Winkler (Ein Hirt)
Egmont Koch (Der Steuermann)
Chor und Orchester der Bayreuther Festspiele
direction : Wolfgang Sawallisch
préparation des chœurs : Wilhelm Pitz
Enregistrement : 1957, Festspielhaus, Bayreuth
4CD Walhall WLCD 0213

Pour finir en beauté cette sélection, comment ne pas attribuer la récompense suprême au véritable must que constitue, surtout dans une prise de son monophonique de bonne qualité, la réédition du premier Tristan à Bayreuth du mythique couple Windgassen-Nilsson, dans la mise en scène de Wolfgang Wagner, à l’heure où le jeune Sawallisch faisait également ses débuts dans le Temple ?
Avec l’art de porter les chanteurs qu’on lui connaît, mais certainement pas encore la placidité qui dessert nombre de ses enregistrements lyriques officiels plus tardifs, le chef d’à peine 34 ans se glisse dans la belle tradition allemande défendue quatre années plus tôt par Jochum, en privilégiant la continuité du flux musical, dans des tempi modérés qui participent en plein à la construction d’une grande arche.
Avec cette énergie rentrée, cette tristesse infinie, cette matière dense mais jamais suffocante, ces accents toujours judicieusement placés, cet art de ménager les transitions en ne quittant jamais du regard la ligne de mire à l’horizon, cette manière de lâcher la bride aux moments cruciaux où le drame se noue et se dénoue, Sawallisch expose le plus bel art lyrique souhaitable devant pareil plateau où la double attention à bien dire le texte et à bien chanter semble la règle numéro un.
Car chanter, Nilsson et Windgassen ne l’auront jamais fait à ce point, et jamais plus, y compris une décennie plus tard, même transcendés par la baguette électrique de Böhm, ils n’afficheront pareil rayonnement vocal, pareils moyens intacts, pareille jeunesse, pareille science du chant.
Cela est particulièrement patent dans la Liebestod, à laquelle Nilsson, encore rigoureuse dans l’intonation, ne réservera plus l’émotivité adolescente et fragile entendue ici, ces délicatesses dans l’émission du son, cette humanité loin de toute glaciation des sentiments, cette beauté du timbre par delà les aigus déjà phénoménaux – la longueur des tenues des imprécations au I – mais jamais dardés comme une fin en soi.
Magnifiquement en voix, la Brangäne de Grace Hoffman, qui n’est qu’incandescence de la matière, violon parmi les cordes de l’orchestre, instaure un vrai dialogue avec sa maîtresse, endossant comme rarement et jamais de manière passive la nécessaire fonction de soutien agissant de la servante et confidente. Immense dans la douleur, dans l’onction, dans l’impuissance, Hans Hotter est le plus bouleversant des Kurwenal, celui dont les murmures à l’oreille de Tristan agonisant, avec ce velouté, cette dévotion, cette détresse, vous hanteront pour toujours.
De même, le roi Marke jeune d’Arnold van Mill, dont c’est l’incarnation majeure à Bayreuth, s’attire toute la compassion du monde dans un monologue chanté avec une dignité, une sobre affliction, une résignation à faire pleurer les pierres. Et tant pis si Walter Geisler, l’excellent Walther de cet été 1957, est un Jeune marin aux épaules sans doute trop larges, car Hermann Winkler plante parfaitement le décor du III en Pâtre, et Fritz Uhl est le meilleur Melot de la discographie, le seul à avoir cette épaisseur, cette vaine rivalité dans la beauté du timbre avec le héros qu’il jalouse. C’est vraisemblablement bien plus qu’un détail pour expliquer la cohésion de ce Tristan immense.
La parution toute prochaine, chez Myto, d’une captation sauf erreur totalement inédite de la reprise de 1958, avec quelques changements notables dans la distribution, aura fort à faire pour s’élever exactement au même niveau.
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