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SELECTION CD |
21 novembre 2024 |
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La sélection de Stéphane Haïk |
La Passion selon St Matthieu BWV 244 Choeur et orchestre du Concertgebouw d'Amsterdam
Willem Mengelberg, direction
Karl Erb, William Ravelli, Jo Vincent, Ilona Durigo, Louis van Tulder, Herman Schey
Philips 416 206-2
N'en déplaise aux spécialistes : à défaut d'incarner une orthodoxie défendable sur le plan de la probité musicologique, la vision que propose Mengelberg de la Saint-Matthieu n'est pas qu'une curiosité d'un temps révolu, sur laquelle on jetterait un rapide coup d'oreille aussi amusé que condescendant. Certes, soixante après - l'enregistrement " live " a été réalisé le 2 avril 1939, dans la grande salle du Concertgebouw d'Amsterdam -, l'extravagance du Néerlandais aura de quoi surprendre : coupes multiples à la limite de la mutilation, rubato aux confins du sacrilège, phrasés frénétiques, discours dégoulinant d'une déferlante sentimentale. Bref, Mengelberg, par ses excès et ses libertés, dépasse l'entendement et franchit allégrement le seuil de la tolérance auditive que supportera notre ouïe, depuis que celle-ci s'est acclimatée - il y a déjà deux bonnes décennies - aux versions marquées du sceau de l'authenticité, respectueuses du texte sacré comme de la spiritualité qui s'en dégage.
Herreweghe (Harmonia Mundi), Harnoncourt (Teldec) ou Koopman (Erato) contre Mengelberg ? La confrontation s'avère d'emblée caduque, pour ne pas dire stérile. Ce serait vouloir comparer l'incomparable : deux " univers " musicaux finissent somme toute toujours par se compléter, à condition d'avoir préalablement saisi leur portée respective. Car autant la démarche des baroqueux a été amplement exposée, décortiquée et justifiée, autant celle de Mengelberg demeure largement méconnue. Avec des moyens stylistiques aux antipodes, celle-ci vise, elle aussi, à la communion, au recueillement, à la bienveillance, à la sérénité, à la félicité. Si Mengelberg n'a pas toujours su capter la correspondance des motifs entre des phrases éloignées l'une de l'autre, il réussit à décrypter la beauté innée des rapports entre les mots et la musique - servis, il est vrai, par un Orchestre du Concertgebouw rompu aux Passions et un Karl Erb, Evangéliste hors pair, à l'intelligence rare -, et à inscrire le tout dans une vaste architecture bien charpentée, aux couleurs vocales et instrumentales tranchées, vives et argentées.
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| Stéphane HAIK
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