6 déc. :
Les Saisons Ă Salzbourg |
Une ouverture spirituelle
Joseph Haydn (1732-1809)
Die Jahreszeiten
Dorothea Röschmann (Hanne)
Michael Schade (Lukas)
Florian Boesch (Simon)
Konzertvereinigung Wiener Staatsopernchor
préparation : Ernst Raffelsberger
Wiener Philharmoniker
direction : Nikolaus Harnoncourt
captation vidéo : Michael Beyer
+ documentaire sur Harnoncourt de Eric Schulz (28 minutes)
Enregistrement : Grosses Festspielhaus, Salzbourg, juillet 2013
1 Blu-ray Disc (ou DVD) EuroArts Unitel Classica 2072674
Harnoncourt de nouveau, point central en juillet 2013 de la semaine introductive du festival de Salzbourg baptisée par son nouveau directeur Ouverture spirituelle, et consacrée aux grands ouvrages sacrés. On sait les miracles que prodigue le vieux maestro autrichien dans la Création de Haydn ; on ne s’étonnera donc guère qu’il réussisse tout autant les Saisons.
Aussi précieux que le concert, un documentaire de vingt-huit minutes proposé en bonus montre le pape du baroque en interview et répétitions, confirmant qu’il est toujours l’une des personnalités majeures du monde musical, par son approche entre pragmatisme terrien et réflexion musico-philosophique fruit d’un esprit exceptionnellement affûté malgré ses quatre-vingt-quatre ans.
Avec une énergie permanente, qui lui vaut à l’issue d’une répétition un très affectueux « tu es fou, Nikolaus ! » de Michael Schade, il reprend une fois encore son bâton de pèlerin, usant de toute son aura intellectuelle pour emmener des Wiener Philharmoniker souvent frileux hors des sentiers battus. Et cela au bout de trente ans de fréquentation mutuelle.
Le concert confirme les déclarations d’intentions, une chose pas si courante, mais cette manière de couper les cheveux en quatre, de faire un sort à chaque mot, à chaque note, qui peut s’avérer parfois agaçante, n’en reflète pas moins un art extraordinairement riche, qui vaut mieux que la plus royale des routines.
Harnoncourt a toujours abhorré la musique débitée de manière mécanique, jusqu’à avouer aux musiciens sous l’œil des caméras qu’il ne sait comment il a réussi à ne pas tuer George Szell, sous la baguette duquel, jeune violoncelliste, il a joué une cinquantaine de fois, et dont il détestait la recherche maniaque d’un jeu prestissime et métronomique.
Ses Saisons, jamais doucement champêtres ou bourgeoises, dépeindront d’un bout à l’autre les duretés du climat, tellement redoutées par les contemporains de Haydn, tellement estompées par notre confort moderne.
La chaleur accablante de son été ne trouvera de rafraîchissement auprès d’aucun climatiseur (les musiciens n’ont du reste pas besoin de simuler la canicule en ce mois de juillet où ils suent à grosses gouttes sous les projecteurs), et nulle cheminée ne viendra à bout des rigueurs de l’hiver de la campagne viennoise, dans ces maisons aux toits de chaume perméables aux quatre vents. Fascinantes évocations.
Dorothea Röschmann, avec ses inégalités, est la musique même, frémissante, fine, constamment expressive. La voix de Michael Schade, de plus en plus typée, rappelle désormais Peter Schreier, dont il partage les inflexions inflexions de ténor d’oratorio germanique idéal, pleine voix un peu pincée et nasale, superbe demi-teinte. Florian Boesch, d’une belle émission claire, joue la rusticité sans vulgarité, trouvant toujours le point d’équilibre entre ligne vocale et relief des mots.
La prise de son, un peu sourde et éteinte, au niveau de gravure trop bas, ne rend que moyennement justice au relief incroyable du travail sur le texte d’Harnoncourt, si l’on en juge notamment par la comparaison avec les extraits de répétition – les chœurs, toujours très beaux, mais un peu plus flous de texte que pendant les sessions de travail.
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