7 déc. :
Eugen Jochum - Les Symphonies |
Eugen Jochum, la tradition objective
Eugen Jochum – The Symphonies
Beethoven, Brahms, Bruckner
Berliner Philharmoniker
Symphonieorchester des Bayerischen Rundfunks
Enregistrements : 1952-1961 (Beethoven), 1951-1956 (Brahms), 1958-1966 (Bruckner)
16 CD Deutsche Grammophon 482 0299 7
Après le coffret Karl Böhm, intéressons-nous à une autre boîte concoctée cette année par Universal Italie, consacrée au chef bavarois Eugen Jochum, dont on nous propose ici les premières intégrales des symphonies de Beethoven, Brahms et Bruckner, augmentées des ouvertures de Fidelio, Leonore II, des Créatures de Prométhée et des Ruines d’Athènes du premier.
Ce retour des premiers Beethoven de Jochum (édités au CD en coffret plat en 2003 dans la collection Original Masters) a de quoi mettre en joie. On y redécouvre le chef allemand dans un sillage globalement post-furtwänglerien, mais en nettement plus objectif, plus soucieux d’une constante articulation franche des cordes, au jeu physique réglé avec un soin maniaque tant dans les enregistrements avec les Berliner (Symphonies n° 2, 3, 4, 6, 7, 8) qu’avec le nouveau-né Orchestre de la Radio bavaroise (Symphonies n° 1, 5, 9).
Et si la Pastorale marche par trop dans les sillons tracés par le grand maître du Philharmonique de Berlin d’alors, sans en avoir tout à fait le potentiel évocateur, les grands moments beethovéniens abondent : une Deuxième superbement articulée, trapue, une Cinquième admirablement féline et musclée à la fois, une très belle Neuvième, sans oublier une ouverture des Créatures de Prométhée grisante d’électricité. Le tout dans d’excellentes prises de son, tant en mono qu’en stéréo.
Les Brahms de la première moitié des années 1950, toujours disponibles à part dans la collection DG Originals, ne sont rien moins qu’une des intégrales prioritaires des symphonies du maître de Hambourg. Avec les Berliner de la fin de l’ère Furtwängler, Jochum reprend le flambeau du vieux maestro allemand et certaines de ses caractéristiques sonores, mais dans une approche infiniment plus rigoureuse et enlevée, moins portée sur la subjectivité.
Fluctuations de tempo très contrôlées, ardeur du chant de cordes, art de faire naître la matière des tréfonds, choix de tempi gardant le cap d’une tension jamais relâchée, on goûte une réussite majeure, dans une mono extrêmement correcte (au très court déraillement près de la bande à 1’10’’ du premier mouvement de la Deuxième).
Quant au cycle Bruckner-DG de Jochum, gravé dans les années 1960, partagé comme les Beethoven entre Radio Bavaroise (Symphonies n° 2, 3, 5, 6) et Berliner Philharmoniker (Symphonies n° 1, 4, 7, 8, 9), il trône depuis sa sortie parmi les incontournables de l’histoire du disque, miracle quasi permanent d’une lecture totalement idiomatique, donnant à chaque instant une impression définitive qu’il faut jouer Bruckner ainsi et pas autrement, en tenant d’une main très ferme le rythme et en construisant de longues périodes toujours soutenues, avec une ferveur constante.
La Cinquième aura rarement été aussi pacifiée, contemplant son apogée terminal avec une plénitude sereine assez unique pour l’époque. La Neuvième, aux antipodes de la vision proposée chez EMI dans les années 1970, refuse les conflits et tente de conserver à tout prix la sérénité au seuil de la mort. La trilogie finale tient d’ailleurs admirablement le choc des écoutes comparées, dans une discographie pourtant extrêmement riche.
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