11 déc. :
L'arc-en-ciel Richard Strauss |
Strauss en documentaires
Richard Strauss
Am Ende des Regenbogens
Film d’Eric Schulz (1h37)
1 Blu-ray Disc (ou DVD) C Major 730004
Richard Strauss Gala
Christiane Goerke, Anja Harteros, Camilla Nylund
Staatskapelle Dresden
direction : Christian Thielemann
Enregistrement : Semperoper, Dresde, 11/06/2014
+ Christian Thielemann – My Richard Strauss
Documentaire de 45 minutes
réalisation : Andreas Morell
1 Blu-ray Disc (ou DVD) C Major 729004
Richard Strauss toujours, abordé cette fois sous l’angle du documentaire dans ce film d’une bonne heure et demie d’Eric Schulz, déjà auteur d’un Karajan, la seconde vie consacré au rapport entre le chef autrichien et l’enregistrement sonore, et d’un Carlos Kleiber, Traces to nowhere. Le sous-titre du documentaire est une référence à une lettre de Richard Strauss où il dit représenter « le bout de l’arc-en-ciel » de la musique allemande.
Ce film sans temps mort, impossible à appréhender en chapitres, est abordé à bâtons rompus, en allers-retours permanents entre les différentes époques de la longue vie du compositeur, via des extraits de lettres lues par des comédiens, des témoignages de musicologues, chanteurs à l’œuvre en masterclass avec Brigitte Fassbender, de musiciens d’orchestre, et les interventions récurrentes du célèbre (outre-Rhin) Stefan Mikisch, sorte de Jean-François Zygel allemand jouant de multiples extraits de poèmes symphoniques et opéras au piano avec des explications imagées, en rien didactiques.
La musique n’a jamais le temps de se laisser vraiment écouter, passant le plus souvent en contrepoint des témoignages sur ce maître au parcours étonnant et à la psychologie particulière, dont l’allure évoquait nettement plus « un patron de banque ou un notaire à la retraite » qu’un artiste. La notion d’abandon de la modernité après les opéras noirs, de revirement néoclassique semble ici contestée avec force exemples d’audaces harmoniques plus tardives, dans la Femme sans ombre entre autres.
Le plus intéressant de ce long métrage tirant en tous sens est de voir le compositeur à la baguette, dont la direction est décryptée par les intervenants, face notamment à la célèbre bande, retravaillée dans un noir et blanc magnifique, captée pendant les sessions d’enregistrement de Till l’espiègle avec les Wiener Philharmoniker en 1944, à l’occasion de ses 80 ans.
Un monument de simplicité dans l’approche de la direction d’orchestre, gestes minimaux, air blasé d’un vieux maestro semblant ailleurs, yeux papillonnants laissant trop facilement penser à un laisser-aller absolument pas de mise, chaque difficulté pour l’orchestre étant accompagnée d’un appel du bras gauche, de petits accents du bout de la baguette, signes d’un art ô combien éprouvé, même si l’on est évidemment aux antipodes de la gestique si sophistiquée et artistique en elle-même du jeune Karajan.
On retrouve aussi les images de l’exécution de l’hymne olympique dans le stade de Berlin en 1936, sommet de la compromission de l’artiste avec les Nazis, dont le Führer, wagnérien fervent, n’était au départ pas antipathique au compositeur, qui comprit toutefois bien vite qu’il avait été piégé en acceptant de diriger la Chambre de musique du Reich sous la gouvernance de Goebbels, et pour laquelle il n’a jamais pu mettre en œuvre la moindre des réformes qui lui paraissaient importantes.
Le rapport avec son épouse, la soprano Pauline De Anha, est également analysé dans sa complexité (notamment par le petit-fils Christian, un vieux monsieur aujourd’hui), faite de périodes d’extrême tension et d’amour sincère au quotidien, jusqu’à ces images très émouvantes de la veuve devant le cercueil du maître, auquel elle ne survivra que huit mois.
Quelques anecdotes enfin donnent de la saveur aux écrits du compositeur. Ainsi, dans un courrier à son épouse, il raconte, de retour d’une représentation d’Arabella, qu’on lui a fait le reproche de diriger trop vite, et d’ajouter avec un bon coup de sabot bavarois : « on eût sans doute préféré dormir sous la baguette Knappertsbusch. »
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