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SELECTION CD |
15 janvier 2025 |
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12 déc. :
Les 90 ans de Pierre Boulez |
Un touche-à -tout de génie
Pierre Boulez – Emotion & Analysis
Gustav Mahler (1860-1911)
Symphonie n ° 2 en ut mineur
Diana Damrau, Petra Lang
Staatskapelle Berlin
Anton Bruckner (1824-1896)
Symphonie n° 8 en ut mineur
Wiener Philharmoniker
Europakonzert 2003 Ă Lisbonne
Ravel, Mozart, BartĂłk
Maria JoĂŁo Pires, piano
Berliner Philharmoniker
Inheriting the Future of Music
réalisation : Günter Atteln & Angelika Stiehler
Eclat
réalisation : Frank Scheffer
A lesson by Pierre Boulez / Sur Incises
réalisation : Andy Sommer
Pierre Boulez – Emotion & Analysis
réalisation : Paul Smaczny & Günter Atteln
Pierre Boulez live at the Louvre (2008)
Igor Stravinski (1882-1971)
L’Oiseau de feu
Orchestre de Paris
Classic Archive Pierre Boulez
Debussy, Schoenberg, Stravinski
New Philharmonia, BBC Symphony Orchestra
Daniel BarenboĂŻm and the Chicago Symphony
Boulez, Debussy, De Falla
Elisabete Matos, soprano
direction : Daniel BarenboĂŻm
Pierre Boulez conducts Modern Classics
Berg, Debussy, Stravinski
Christine Schäfer, soprano
Chicago Symphony Orchestra
direction : Pierre Boulez
10 DVD EuroArts 2061008
Le 26 mars 2015, Pierre Boulez, l’un des artistes français les plus célébrés dans le monde, monument vivant de l’Histoire de la musique par l’acuité de son verbe, la précision de ses analyses, la virulence de ses prises de position, mais aussi l’exceptionnelle qualité de ses compositions comme de ses interprétations au pupitre, fêtait ses 90 ans, retiré dans sa maison de Baden-Baden et trop faible pour participer aux célébrations.
Euro Arts ressortait pour l’occasion, regroupés dans une boîte cartonnée, l’ensemble des concerts et documentaires de son catalogue consacrés au compositeur-chef d’orchestre. À la baguette, on retrouve donc Boulez d’abord dans son fond de répertoire (la musique du XXe siècle), et chronologiquement, en premier dans un programme Classic Archive bien connu.
Fêtes et Jeux de Debussy y sont abordés à la tête du New Philharmonia de l’époque Klemperer, dont les qualités ne pouvaient que séduire Boulez qui, loin de toute coquetterie, dirige avec des lunettes de soleil pour contrer les effets d’un zona. Tout aussi précieuses, les Images de Debussy et la Musique d’accompagnement d’une scène de film de Schoenberg (BBC, 1974), typiques de son geste franc, solaire, ultra précis et encore tranchant, ainsi que dans un Sacre du printemps étrangement enregistré (les timbales plus à l’avant que les cordes) mais d’une redoutable efficacité (BBC, 1997), nettement moins désincarné que son ultime enregistrement studio à Cleveland.
En 2000 à la Triennale de Cologne, le maestro distille sa science intacte au Chicago Symphony dans la Lulu-Suite de Berg, quelques mélodies avec orchestre de Debussy (Christine Schäfer, format adapté mais français moyen, après un miracle pur dans Berg) ainsi qu’un Oiseau de feu intégral bénéficiant d’un geste analytique et des cuivres typiques mais jamais excessifs du CSO.
En 2003 dans l’église Sainte-Marie de Lisbonne pour l’Europakonzert annuel des Berliner Philharmoniker, Boulez défend un Concerto pour orchestre de Bartók aux timbres scrutés et à la très belle virtuosité, après un Tombeau de Couperin de Ravel merveilleusement détaillé (le hautbois) et presque mélancolique, et un Concerto pour piano n° 20 de Mozart rigoureux, sobre, avec une Maria João Pires tirant des merveilles d’un méchant Yamaha avec ses toutes petites mains et son toucher au sourire triste, typiquement mozartien.
Enfin, le chef revient en 2008, après une séance d’explications salle Pleyel pour des scolaires très moyennement passionnés, à l’Oiseau de feu intégral sous la pyramide du Louvre, pour s’y laisser aller à plus de douceur, de suavité, de sensualité presque que de coutume, avec un Orchestre de Paris en splendeur et sans troquer trop d’énergie.
Hors de ses sentiers battus ensuite, dans un répertoire qu’il n’a pratiqué abondamment et enregistré qu’en fin de carrière, il défend une Huitième Symphonie de Bruckner (la même qu’au CD chez DG) captée à la basilique de Saint-Florian en 1996, pour le centenaire de la mort du compositeur, où bien qu’allégeant les lignes et des tutti denses sans être teutons, il laisse chanter le Philharmonique de Vienne dans ce répertoire qu’il pratique depuis toujours, se contentant de mettre en exergue les éléments d’écriture les plus modernes.
Même sentiment dans la Deuxième Symphonie de Mahler donnée pour son quatre-vingtième anniversaire en 2005 avec la Staatskapelle de Berlin (un concert bien supérieur à l’enregistrement DG un peu plus récent avec des Wiener éteints), où les motifs, morcelés, circulent avec une clarté absolue de la polyphonie, dans un ouvrage défriché avec un geste modulant la pâte sonore sans jamais assécher la rhétorique émotionnelle colossale de l’ouvrage – d’excellents chœurs, de non moins excellentes solistes.
Comme un bonus, on retrouve aussi le concert de Barenboïm avec Chicago qui complétait celui de Boulez à Cologne, où le chef argentin défendait d’une manière assez personnelle les Notations de Boulez, plus symphoniques, moins cristallines que sous la baguette de son créateur, après une Mer de Debussy un peu épaisse mais non dénuée de charme et un Tricorne étincelant, très méridional, faisant gronder cuivres et tambours de basque comme à la parade.
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Boulez compositeur
Autre facette ensuite avec Boulez le compositeur avide d’éclairer les jeunes générations, et qu’on retrouve rayonnant de joie de partager dans le documentaire sur l’Académie du festival de Lucerne Inheriting the Future of Music, où le vieux maestro dispense son savoir tant à de jeunes chefs en masterclasses, notamment sur le Sacre, qu’à de jeunes compositeurs ou à des instrumentistes d’orchestre jouant ses œuvres.
Un parcours passionnant et émouvant, où on peut le voir dans des moments précieux, d’abord en répétition puis en excursion en téléphérique sur les sommets suisses surplombant le Lac des quatre cantons, avec une génération très éloignée de la sienne, un peu intimidée par ce vieux monsieur qui appartient déjà à l’Histoire, et que certains ont tout de même du mal à raccrocher à l’époque où il fréquentait Stravinski, si éloignée d’aujourd’hui.
En Bonus de ce DVD 2, une exécution en concert (avec un court interlude d’explications intégré au montage) de Jeux de Debussy, dans une approche encore bien plus transparente, plus souple aussi, moins moderne à tout prix, que celle de 1968 du DVD 8, et les cinq Notations pour orchestre, qui reçoivent un triomphe du public lucernois.
Au cœur de cette somme boulézienne trône le documentaire Emotion & Analysis qui a donné son titre au coffret tout entier, écho d’une déclaration du chef expliquant ce qu’il cherche à atteindre dans le Concerto pour orchestre de Bartók qu’on le voit répéter avec les Berliner à Lisbonne. Et d’ajouter que plus l’analyse, plus la connaissance intime d’une partition est grande, plus on peut se permettre de laisser parler le sentiment.
Il avoue d’ailleurs être devenu avec les années un chef moins formaliste qu’autrefois, se permettant ici ou là un léger rubato, un ralenti non écrit. Très intéressant documentaire au demeurant, qui narre en filigrane les difficiles années d’exil américain et la mort de Bartók à New York, et l’influence de cet ultime séjour sur son écriture orchestrale, beaucoup plus brillante, typique du mode de jeu recherché alors dans le Nouveau Monde. Seul bémol, le DVD ne propose que l’anglais comme surtitrage, le chef s’exprimant en allemand et la narration étant déjà dans la langue de Shakespeare.
Le documentaire le plus passionnant sur l’art de Boulez compositeur reste sans doute Eclat, du nom de l’un des ses chefs-d’œuvre instrumentaux, abordé ici lors d’une séance de travail du chef Ed Spanjard avec son ensemble contemporain néerlandais (1994). Pièce minimaliste, basée essentiellement sur la résonance, dans la mouvance lointaine du dernier Mahler et surtout des timbres diffractés d’un Webern.
Donnant ses trucs, explicitant les passages les plus difficiles au chef hollandais, Boulez se livre aussi en interview sur son métier de compositeur, dont il ne pourrait se passer à l’inverse de la direction, sur l’influence de Paul Klee quant aux différents niveaux sonores de son écriture, comme les arrière-plans si travaillés du peintre suisse, et de la triple influence qui l’a permis de se « guérir de la musique occidentale » : le gamelan balinais, le gagaku du Japon et les percussions africaines.
Toujours garant d’une grande limpidité d’expression, loin de tout discours fumeux ou pseudo philosophique, Boulez évoque son art complexe avec des mots très simples et une pensée pragmatique, loin du conceptualisme dans lequel se réfugient tant de créateurs. Il faut toutefois une certaine inclination à la musique contemporaine pour suivre sans décrocher le documentaire A lesson by Pierre Boulez, où à la tête de l’Ensemble Intercontemporain, le chef se lance dans une conférence avec de multiples exemples à l’appui, puis une exécution intégrale sans interruption de Sur Incises à la Cité de la Musique.
Au total, dix DVD à chérir, magnifique somme sur l’un des artistes les plus complets de son siècle.
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| Yannick MILLON
1er déc. :
Così fan tutte à Salzbourg2 déc. :
Don Giovanni à Salzbourg3 déc. :
Les Originals ont vingt ans4 déc. :
In Memoriam Claudio Abbado5 déc. :
Andris Nelsons à Lucerne6 déc. :
Les Symphonies de Mozart par Hogwood7 déc. :
Chailly dirige la Neuvième de Mahler8 déc. : Sibelius historique9 déc. : Sibelius moderne10 déc. : Le Chevalier à la rose à Salzbourg11 déc. :
L'arc-en-ciel Richard Strauss12 déc. :
Les 90 ans de Pierre Boulez13 déc. :
Les 75 ans de Stephen Kovacevich14 déc. :
Mozart on tour 15 déc. :
Les 80 ans du National16 déc. :
Claude à l'Opéra de Lyon17 déc. :
Fierrabras à Salzbourg18 déc. :
Mercury volume 319 déc. :
Beethoven par le Quatuor Belcea20 déc. :
Ferenc Fricsay, volume 221 déc. :
Paul Dukas et le prix de Rome22 déc. :
Markevitch - ICON23 déc. :
Intégrale Stravinski DG24 déc. :
Intégrale Richter Universal | |
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