14 déc. :
Mozart on tour |
Mozart par les voyages
Mozart on tour
14 piano concertos & 13 documentaries
Following Mozart’s journey through Europe
Documentaires de Robin Lough, présentés par André Prévin (1991)
Wolfgang Amadeus Mozart (1756-1791)
Concertos pour piano n° 1, 4, 5, 6, 8, 9, 12, 17, 19, 20, 23, 24, 26 et 27
Vladimir Ashkenazy, Malcolm Frager, Homero Francesch, Heidrun Holtmann, Ivan KlánskĂ˝, Zoltán Kocsis, Radu Lupu, AndrĂ© PrĂ©vin, Desző Ránki, Mitsuko Uchida, Christian Zacharias
1 Blu-ray Disc (indisponible au seul DVD) Euro Arts 2001024
Raconter Mozart par ses déplacements, voilà l’objectif que s’était fixé la série Mozart on tour diffusée à la télévision britannique en 1991, pour le bicentenaire de la mort du compositeur. Une excellente idée quand on songe que le prodige de Salzbourg, mort avant son trente-sixième anniversaire, a passé presque un tiers de son existence sur les routes, en quête d’un poste officiel, de reconnaissance.
Cette série par certains aspects vieillotte (l’image, qui fait bien ses vingt-cinq ans, les pseudo reconstitutions d’époque de certains événements de la vie de Mozart, mais surtout des mises en scène de courts extraits d’opéra d’un kitsch absolu) mérite qu’on s’y attarde par l’originalité avec laquelle elle aborde le génie d’un compositeur ballotté dès le plus jeune âge d’une capitale à l’autre par un père se sentant investi d’une mission divine face à ce miracle du ciel.
Le principe est simple : chacune des treize émissions s’attarde sur une ville, de manière presque chronologique, et dans un format d’une petite heure présentant pour moitié un documentaire – où d’autres genres que le concerto sont abordés, ici par un mouvement de sonate pour violon et piano, un quintette, là par un divertimento, une danse de cour – puis pour autre moitié l’exécution intégrale d’un concerto pour piano, genre, avec l’opéra, où Mozart a sans doute laissé ses plus impérissables chefs-d’œuvre.
Avec parfois des traits d’union subtils entre documentaire et concerto a priori sans rapports, mais liés par un détail biographique – le KV 414, de 1782, choisi pour la première émission sur Londres, où Mozart s’était produit en 1764, à l’âge de 8 ans, et où il avait rencontré Jean-Chrétien Bach, à qui il devait rendre un hommage funèbre dans le mouvement lent du Concerto n° 12 en question dix-huit ans plus tard.
Compagnon de route de ces douze heures et demie d’émissions, le chef d’orchestre et pianiste André Prévin déambule dans tous les lieux d’importance de la biographie mozartienne, contextualisant chaque destination, chaque période de la vie du compositeur, étayée par la lecture d’extraits de lettres par le comédien Michael Kitchen, notamment dans les palais où Mozart a joué pour l’aristocratie ou les grandes cours européennes.
Un excellent moyen de se rendre compte de l’aventure que représentait alors le moindre déplacement, lorsqu’il fallait trois jours pour se rendre en fiacre de Salzbourg à Munich, éloignés seulement de cent cinquante kilomètres qui s’avalent aujourd’hui en une heure et demie, quand le trafic dense des autoroutes de Bavière le permet.
Tout à fait passionnante sur les voyages de l’enfant puis de l’adolescent, notamment en Angleterre et en Italie, mais aussi dans le chapitre consacré à Salzbourg et à la tournée à Mannheim et Paris pendant laquelle il perdra sa mère, la série ne tend à s’essouffler que lorsqu’elle se penche par trop sur la composition bien connue des opéras, alors que les données et anecdotes de déplacements sont toujours passionnantes.
Elle insiste en outre sur Mozart premier musicien freelance de l’histoire, épris de liberté, de volonté de créer sans s’astreindre au service d’un maître ou s’épuiser à donner trop de leçons, avec la contrepartie bien connue de rentrées financières aléatoires entre les premières années fastes de l’installation à Vienne et la terrible désaffection du public à la fin de la décennie 1780.
La narration n’insiste d’ailleurs pas du tout sur les dettes du compositeur, envisagées comme une forme de dommage collatéral. De la même manière, la vie domestique importe beaucoup plus ici que les opinions politiques de Mozart, dont l’appartenance à une loge maçonnique est à peine évoquée par le réalisateur Robin Lough.
Dans des lieux aussi prestigieux que le Hampton Court Palace de Londres, le Teatro scientifico del Bibiena de Mantoue, le théâtre rococo du château de Schwetzingen, le Mozarteum de Salzbourg, la grande galerie du Château de Schönbrunn à Vienne, le palais Waldstein de Prague, la Sophiensaal de Munich ou encore la salle Christian Zaiss de Wiesbaden, les concertos sont exécutés par un panel de pianistes et orchestres différents, toujours dans un cadre intimiste qui permet d’imaginer la proximité du public d’alors avec le compositeur dirigeant du clavier.
On s’en doute, les interprétations présentées ne sont pas du même niveau, et l’on sortira du lot le Concerto Jeune homme par Mitsuko Uchida, diaboliquement détaillé et d’une expressivité constante, les pages mineures (Concerto n° 6, n° 8) abordées par Christian Zacharias, mais aussi l’expressivité à fleur de clavier, si délicatement mozartienne, de Radu Lupu (Concerto n° 19) ou Homero Francesch (Concerto du Couronnement), ce dernier avec l’accompagnement superbe de Gerd Albrecht.
Du clavier comme au temps du compositeur, André Prévin s’embarque dans un très beau Concerto n° 25, comme son collègue Vladimir Ashkenazy dans le Concerto n° 12. Une petite erreur au passage : dans la liste de pianistes annoncée sur la pochette de ce Mozart on tour s’est glissé le nom d’Alicia de Larrocha qu’on n’entendra pas ici.
Une broutille qu’on oubliera plus vite que le seul véritable bémol (justifiant la perte d’un cœur) de cette réédition sur support Blu-ray uniquement, choisi pour son exceptionnelle capacité de stockage (un seul disque pour 741 minutes d’émissions), à savoir l’absence de tout surtitrage, limitant l’objet aux seuls familiers de la langue de Shakespeare, qu’il n’y a toutefois pas besoin de maîtriser à un niveau universitaire pour suivre ce voyage télévisuel limpide.
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