Intégrale Warner Charles Munch |
Le grand Charles
Charles Munch
The Complete Recordings on Warner Classics
Orchestre de Paris
Orchestre national de l’ORTF
Orchestre des Concerts Lamoureux
Orchestre de la Société des concerts du Conservatoire
direction : Charles Munch
Enregistrements : Paris, 1935-1968
13 CD Warner Classics 0190295611989
Il y a deux ans, RCA sortait son intégrale Munch en 86 CD, gravée entre 1947 et 1963 (incluant quelques sessions Columbia US), pour une écrasante majorité avec le Boston Symphony. Il était donc logique, cet automne où l’on célèbre le cinquantième anniversaire de sa disparition, que les années de carrière sur notre sol entourant cette période du chef français fassent à leur tour l’objet d’une boîte exhaustive – bien que nettement plus modeste en quantité –, Warner ayant les droits d’exploitation de tout le catalogue EMI et Erato, mais aussi les vieilles cires Gramophone, Pathé et Columbia.
Sur les 13 CD de ce coffret anniversaire, les 7 derniers reprennent les 78 tours de l’immédiat avant-guerre et la période de l’Occupation (1935-1944), grosso modo à la tête de l’Orchestre de la Société des concerts du Conservatoire, dont Munch était alors directeur musical. Où l’on notera, malgré la réputation de meilleure formation française de l’époque, de réelles limites en termes de cohésion et de justesse, notamment dans les accompagnements de concertos où l’on sent les musiciens assez moyennement concernés.
Tout dépend qu’ils enregistrent avec une Marguerite Long septuagénaire dans un Empereur assez incandescent malgré les doigts qui flanchent, ou encore dans sa très belle Rhapsodie portugaise d’Ernesto Halffter, avec Joseph Szigeti dans le concerto de Bloch, avec Alfred Cortot dans un Concerto pour la main gauche rempli de pains, après un magnifique Quatrième Concerto de Saint-Saëns à Londres en 1935 avec orchestre même pas crédité, ou encore Jacques Février, plus carré dans le même Ravel.
On retient surtout de ces sessions liminaires quelques trésors oubliés du répertoire hexagonal : le poème symphonique Nuit… et le micro Chant de la terre à la française Le Cercle des heures de Gustave Samazeuilh, la Habanera de Louis Aubert, les Trois complaintes du soldat de Jolivet avec un Pierre Bernac aussi idéal que dans une Cantate BWV 198 de Bach en merveilleuse voix ténorisante, sans oublier la plus grisante Danse des morts de Honegger du disque, avec un Jean-Louis Barrault complètement allumé.
Après la toute première Symphonie fantastique studio, déjà très engagée, du chef alsacien (Orchestre national, 1949), on aborde l’ère stéréo et certains albums majeurs sur les 6 CD restants. Avec l’Orchestre Lamoureux sur les cimes de Roussel (Symphonie n° 3, n° 4, Suite en fa) chauffés à blanc et remarquablement enregistrés. Sentiment intact avec André Navarra, surtout dans un Concerto pour violoncelle de Lalo d’un romantisme emporté, et enfin dans une Deuxième de Dutilleux qui n’a pas pris une ride, complétée par des Métaboles inapprochables avec l’ONF.
Enfin, sur les six en question, trois disques documentent les quelques pièces qu’a réussi à enregistrer (1967-1968) le grand Charles avant de mourir en tournée avec un Orchestre de Paris né sur les décombres de la Société des Concerts. Et si l’album Ravel demeure plus épais qu’à Boston (Boléro, Pavane), malgré la nièce par alliance Nicole Henriot-Schweitzer au clavier, on a rarement entendu plus bel accompagnement du Concerto en sol.
De même, plus que pour une Première de Brahms aux forceps, on garde de l’affection pour l’ultime Fantastique des cinq de studio du vieux chef, remarquablement remasterisée et qui n’a rien perdu de ses sonorités glauques et décapantes, dans une forme de peinture infernale à la Jérôme Bosch, avec le regretté Jean-Claude Malgoire au cor anglais dans la Scène aux champs.
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